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Contenu et portée d’un permis de construire modificatif tacite : les précisions de la Cour de cassation

Civil - Immobilier
03/10/2019
À la suite de condamnations pour exécution de travaux non autorisés par un permis de construire, la chambre criminelle a eu à s’interroger sur la portée de deux permis modificatifs tacites.
Deux frères ont chacun obtenu un permis de construire pour deux villas en Corse dont la moitié de l’étendue sera construite au-dessus de terrains naturels. Le directeur du service de l’urbanisme d’Ajaccio relève des irrégularités de construction et invite les frères à demander un permis de construire modificatif. Les constructions avaient néanmoins déjà été commencées en mai 2014. En septembre 2014, un agent de la commune a relevé plusieurs irrégularités de construction non conformes aux permis pour les deux villas. Après instruction, les frères ont été poursuivis et condamnés pour exécution de travaux non autorisés par un permis de construire. Soutenant notamment que deux permis modificatifs tacites ont été accordés, autorisant ainsi leurs travaux, les deux frères forment un pourvoi en cassation.
 
En premier lieu, la Cour de cassation a dû s’interroger sur le contenu et la portée de permis de construire tacite.
 
La cour d’appel ne retient pas d’effet exonératoire des permis modificatifs tacites. Elle relève que les procès-verbaux constatant les irrégularités ont été dressés en connaissance des demandes de permis modificatifs et que « rien aux pièces communiquées par les prévenus ni à celles de la procédure, n'établit que ce permis modificatif invoqué concerne bien l'ensemble des irrégularités détaillées dans la prévention ».
 
La Chambre criminelle valide ce raisonnement. Elle souligne que « dès lors que le contenu et la portée d’un permis tacite ne peuvent être démontrés que par le pétitionnaire sur la base et dans les limites de la demande qu’il a faite, laquelle relève de l’appréciation souveraine des juges du fond, la cour d’appel a justifié sa décision ». La solution ne condamne pas le principe d'un permis implicite, à l'instar d'un arrêt de 2014 (Cass. crim., 9 sept. 2014, n° 13-85985), mais exige la preuve de l'existence et du contenu de la demande de permis modificatif. 
 
Par ailleurs, le pourvoi reproche à la cour d’appel d’avoir ordonné la remise en état des lieux dès lors que le prévenu ne justifiait pas d’une installation depuis plusieurs années.
 
Cette décision est confirmée par la Cour de cassation affirmant que « dès lors qu’elle constatait que les bâtiments litigieux étant en site inscrit, ils ne sont ni régularisables ni susceptibles de demeurer en l’état, la cour d’appel, qui a opéré la recherche prétendument omise, a justifié sa décision ».
 
La Haute juridiction civile conclut en validant la peine d’amende infligée aux prévenus.
 
Source : Actualités du droit